Aller au contenu principal
[Revue de presse. TdG, 27 août 25 – Les invités]

Le titre de l’initiative cantonale IN 180, «Pour + de logements en coopérative», peut sembler séduisant. En réalité, elle entraînerait des conséquences graves pour le logement à Genève. Selon le texte, il faudrait qu’«au moins 10% du parc de logements du canton soit constitué de logements en coopérative d’ici à 2030». Ambitieux? Plutôt irréaliste et dangereux.

Les initiants avancent que dans ces nouveaux logements créés en coopérative, les loyers seront plus bas que ceux de locatifs ordinaires. Ils seront plus élevés, si l’on compare ce qui est comparable. En effet, les trois leviers préconisés pour affecter des terrains à ces constructions (préemption, expropriation, usage du fonds LUP) ne permettent, selon la loi, qu’un seul type de construction: des logements d’utilité publique (LUP) destinés aux revenus modestes. Pourtant, l’entrée dans une coopérative exige l’achat de parts sociales importantes (20’000 à 50’000 francs selon la taille de l’objet). À cela s’ajoute un loyer renchéri des frais supplémentaires liés au droit de superficie. Au final, les loyers d’une coopérative de l’IN 180 seront plus élevés que ceux de locatifs de la même catégorie LUP. C’est d’autant plus absurde de faire usage du fonds LUP, pourtant jusqu’ici affecté à des logements réservés à de bas revenus, pour financer des appartements qui, finalement, leur seront inaccessibles.


Les personnes à revenu modeste ne sont pas les seules lésées: le strict contrôle des revenus restreint fortement l’accès pour une grande partie de la population. Si l’on y ajoute l’impossibilité de transmettre ces logements aux proches – malgré l’investissement – l’on peut se demander qui pourraient être les destinataires de ces habitations. Car c’est bien là l’un des paradoxes cachés de l’IN 180. Au rythme où l’on construit actuellement à Genève (environ 2500 logements par an), l’initiative, qui demande de bâtir 11’000 habitations d’ici 2030, imposerait de ne réaliser que des logements coopératifs LUP ces prochaines années. Aucun panachage: la diversité des aspirations des Genevois ne serait pas respectée. Aucun autre type d’habitation ne serait bâti, pas même des coopératives à loyer dit «libre». Vous cherchez à acheter ou à louer ailleurs que dans une coopérative? Patience, on construit d’abord des coopératives LUP qui ne seront pas accessibles aux plus bas revenus mais qui leur seront pourtant légalement réservées! Ce paradoxe est insoutenable.

Autre aspect que je ne peux pas cautionner: le recours généralisé à l’expropriation de terrains privés. D’une part parce que cette mesure extrême provoquera inévitablement de longues bagarres judiciaires, ce qui ne fera que ralentir voire bloquer les projets de construction – et aggraver ainsi la crise du logement. Et d’autre part parce que l’État et les communes, les plus grands propriétaires du canton, particulièrement dans le secteur du PAV, disposent déjà d’assez de terrains pour réaliser ce type de projets coopératifs sans bloquer la construction d’autres types de logements. Faut-il vraiment s’engager sur la voie d’une solution unique, inadaptée aux aspirations d’une majorité de Genevois et qui ne résoudra malheureusement pas nos problèmes de logement? Avec la plus grande conviction, je réponds «non» et invite les Genevoises et Genevois à rejeter l’IN 180.

Adrien Genecand
Député PLR au Grand Conseil