Une initiative, beaucoup de questions
Vous entendez parler d’expropriations, de parts sociales obligatoires, de blocages?
Est-ce que l’initiative 180 va vraiment créer plus de logements à Genève ?
Est-il vrai que l’IN180 pourrait aggraver la pénurie de logements ?
Oui. En imposant un modèle unique et en déclenchant des procédures d’expropriation et de contentieux, l’initiative risque de stopper les constructions et de bloquer de nombreux projets. Pendant qu’on débattra en justice de qui possède quoi, les Genevois continueront à chercher un logement.
Est-il vrai que l’IN180 ne crée pas de logements à loyers libres mais que des LUP ?
Absolument. L’initiative impose 3 moyens pour construire ces 11’000 logements : la préemption, l’expropriation et le fonds LUP. Le Tribunal fédéral l’a rappelé : ces 3 outils obligent à ne construire que du logement d’utilité publique (LUP), soit des logements soumis à un contrôle des revenus et du taux d’occupation. Il est donc totalement faux d’affirmer que l’IN180 permet de construire des coopératives accessibles à tous ou à loyer libre. Les lois sur lesquelles reposent l’IN180 ne le permettent pas.
Est-ce que l’État a vraiment besoin d’une initiative pour construire des coopératives ?
Absolument pas. L’État possède déjà des milliers de mètres carrés de terrains. Il pourrait construire davantage de coopératives sans changer une virgule à la loi actuelle. L’Etat favorise déjà les coopératives via notamment la mise en place d’un plan d’actions lancé en 2016 visant à leur « donner un coup d’accélérateur ». Le plus important des nombreux projets à venir, le développement du périmètre Praille-Acacias-Vernets (PAV), prévoit de réserver 40% des 12’000 logements prévus à des coopératives.
L’initiative 180 ne résout-elle pas un problème ? Ne vaut-elle pas mieux que rien ?
Non, elle aggrave tout. L’IN180 est mal pensée, rigide et contre-productive. Elle retire 11’000 logements pour en faire des habitations à accès restreint (achat de parts sociales couplé à un contrôle des revenus et du taux d’occupation), détourne des fonds destinés aux plus modestes, étatise massivement le sol et déclenche une vague de contentieux. Ce n’est pas une réforme : c’est un diktat mal pensé qui paralyse au lieu de construire.
Les loyers seront-ils vraiment moins chers dans les coopératives LUP ?
Certainement pas. Les coopératives devront payer une rente de superficie (loyer du terrain), rembourser 95 % de financements bancaires et respecter un amortissement accéléré. Ces charges supplémentaires s’ajoutent au loyer des coopérateurs. Résultat : des loyers plus chers qu’un LUP classique, avec en plus l’obligation de verser des parts sociales de CHF 20’000 à CHF 50’000.
Pourquoi dit-on que l’IN180 pénalise les personnes à bas revenu ?
Parce qu’elle les exclut de facto. Les logements coopératifs LUP exigent des parts sociales élevées, alors même qu’ils sont financés avec le fonds LUP réservé aux revenus les plus modestes. C’est un détournement de mission sociale. Demander à une famille modeste d’avancer des dizaines milliers de francs pour avoir un logement public, c’est une absurdité sociale.
Peut-on transmettre un logement coopératif à ses enfants ?
Non. Les règles des coopératives et les contraintes du régime LUP interdisent toute transmission automatique. Même à ses enfants. Le logement retourne à la coopérative, sans possibilité de choisir le successeur. On est loin de la stabilité résidentielle.
Est-il vrai que les procédures d’expropriation vont ralentir les projets ?
Oui. Parce qu’il y a désaccord sur le prix, l’État entre en contentieux avec les propriétaires. Ces procédures durent des années. L’initiative prévoit un usage quasi systématique de la préemption et de l’expropriation : cela signifie des blocages juridiques en cascade, donc moins de logements construits, plus lentement.
L’État doit-il vraiment utiliser les terrains privés pour construire ?
Non. L’État, les communes, les fondations de droit public telles que la FPLC, la FPAV et d’autres fondations publiques possèdent déjà de nombreux terrains. L’initiative pousse à confisquer du terrain privé alors que le foncier public est loin d’être saturé.
Les coopératives bénéficient-elles déjà d’aides aujourd’hui ?
Oui. Et beaucoup. Elles reçoivent des terrains publics, des exonérations fiscales, des cautionnements d’État, des droits à bâtir prioritaires. Le canton de Genève favorise déjà les coopératives, notamment par le biais de son plan d’actions lancé en 2016. Certaines coopératives sont de véritables promoteurs.
Le modèle zurichois ne devrait-il pas inspirer Genève ?
Non. Zurich et Genève sont très différentes. À Zurich, les coopératives sont ancrées dans une tradition ouvrière de longue date. Elles se sont historiquement développées sainement avec des fonds propres en suffisance. À Genève, une autre voie a été suivie avec le développement des fondations communales et des fondations de droit public pour assurer des logements à bon marché. Comparaison n’est donc pas raison.
Le logement coopératif, ce n’est pas bien ?
Qui décide de l’attribution des logements dans une coopérative ?
Les coopératives elles-mêmes. Il n’existe pas de système unique, transparent ou étatique. Certains critères sont flous, d’autres biaisés par l’ancienneté ou l’affiliation. À Zurich, des scandales ont éclaté pour des logements coopératifs occupés par des ménages avec des revenus de plus de 500’000 francs. Rappelons que pour devenir coopérateur, le demandeur de logement doit obligatoirement adhérer préalablement à une coopérative. En plus, pour entrer dans une coopérative IN180, il faudra respecter des seuils de revenus et un taux d’occupation.
Est-ce que toutes les coopératives vont bénéficier de l’IN180 ?
Non. Ce sont surtout les grandes coopératives proches des milieux politiques (CODHA, Groupement des coopératives genevoises) qui seront désignées comme maîtres d’ouvrage. Les petites structures ou initiatives citoyennes risquent d’être marginalisées.
Est-ce que ce type de logement est simple à vivre ?
Non. Cela demande un investissement personnel et des responsabilités supplémentaires à la location. Un logement coopératif implique une participation active à divers travaux tels que des assemblées, des règlements internes, des travaux à organiser, en plus de respecter les contraintes LUP (revenu, taux d’occupation, parts sociales). C’est une lourde charge pour beaucoup de locataires.
Est-ce que l’IN180 va créer des emplois ou une dynamique économique ?
Non. Au contraire, les procédures judiciaires inévitables liés aux expropriations vont former de longs blocages. Les retards de construction et l’incertitude juridique nuisent à l’investissement. L’initiative fige le marché au lieu de l’animer. Elle bloquera les projets à Genève, par insécurité foncière.
Existe-t-il une alternative plus efficace que l’IN180 ?
Oui. Mieux exploiter les terrains publics, favoriser toutes les formes d’habitat en fonction des besoins réels, et construire plus, plus vite, en respectant la mixité.